Combattre les impasses diagnostiques et thérapeutiques des maladies rétiniennes
En France, plus de 110 000 personnes souffrent d’une cécité légale. Parmi ces cas, plus de 50% sont dus à des maladies génétiques qui touchent la rétine, le tissu qui tapisse le fond de l’œil. Ces maladies rétiniennes sont dues à des altérations dans des gènes qui sont importants pour la structure ou pour la fonction des cellules photoréceptrices de l’œil, les bâtonnets qui assurent la vision en faible luminance et la vision sur le côté et les cônes qui assurent la vision centrale, et/ou le tissu de soutien sous- jacent (l’épithélium pigmentaire rétinien). De telles altérations entraînent une dégénérescence progressive de ces tissus qui conduit à une dégradation progressive de la vision. Plus de 250 gènes différents, lorsque mutés, peuvent être impliqués dans ces dégénérescences.
Le sous-groupe de maladies rétiniennes le plus fréquent est celui des rétinites pigmentaires, qui lui-même est liée à des mutations dans une soixantaine de gènes différents. Cette forte hétérogénéité génétique, associée à une forte hétérogénéité clinique, génère des défis importants tant au niveau diagnostique que thérapeutique.
Actuellement on observe une évolution très rapide dans le développement des thérapies génétiques dans certaines dystrophies rétiniennes. Ce phénomène s’est
accéléré ces dernières années grâce à l’approbation récentes du Luxturna qui est proposé en injection sous-rétinienne dans les rétinites pigmentaires avec des mutations dans le gène RPE65. Il s’agit là du premier médicament génétique pour une maladie rétinienne. Le développement de cette molécule a conduit à un changement de paradigme dans la recherche rétinienne et a donné de l’espoir à de nombreux patients dans le monde.
En conséquence, de nombreux essais cliniques ciblant d’autres sous-types génétiques de maladies rétiniennes sont en cours. Il est donc essentiel que chaque
patient soit correctement diagnostiqué sur le plan génétique avec l’identification des variants ou mutations pathogènes. Chaque patient avec un diagnostic clinique et génétique sera inclus dans une base de données d’un des Centres de Référence Nationaux dédiés aux affections sensorielles génétiques. Ainsi, chaque patient pourrait être informé et candidat potentiel pour un essai clinique émergent.
L’équipe Vision localisée à l’Institut des neurosciences de Montpellier, Inserm U1051, est dédiée depuis presque 20 ans au combat contre ces maladies qui menacent progressivement la vision. En plus de notre activité de recherche, les membres de notre équipe ont une très forte activité clinique par le Centre National de Référence des Maladies Sensorielles Héréditaires, MAOLYA, coordonné par le Pr Isabelle Meunier, ainsi qu’une activité de Diagnostic Moléculaire de Référence coordonnée par le Dr Anne- Françoise Roux au CHU de Montpellier et le Dr Claire-Marie Dhaenens au CHU de Lille. Ce partenariat nous permet d’avoir une approche originale pour notre recherche basée sur des modèles rétiniens de patients que nous créons. Pour cela, nous prélevons un petit fragment de peau (biopsie de peau) d’un patient porteur d’une ou des mutations dans un gène que nous étudions. Ensuite, nous ajoutons des facteurs spécifiques permettant aux cellules de perdre leur identité de peau (se dédifférencier) et de devenir des cellules « Souches Pluripotentes Induites » ou « IPS » qui pourront être conservées indéfiniment et qui ont la capacité de se redifférencier en n’importe quel tissu du corps. Enfin, nous redifférencions les cellules IPS soit en cellules de l’épithélium pigmentaire, soit en organoides rétiniens contenant des photorécepteurs. Ces modèles reproduisent la morphologie et la fonction rétinienne ainsi que les défauts associés à la mutation (ou les mutations) d’origine, et représentent donc des outils extrêmement puissants pour étudier les maladies associées.
Nous avons été des pionniers dans cette approche sur Montpellier, et nous restons à ce jour une des rares équipes en France à être experte dans cette méthodologie.
De plus, il est extrêmement important de consolider cette technologie dans le cadre du Plan France Médecine Génomique 2025 qui a pour objectif de génotyper (identifier la ou les mutations responsables de la maladie) la rétinite pigmentaire dans lequel, nous sommes fortement implantés. Cette initiative nationale permet le séquençage du génome entier des patients atteints de cette maladie afin de fournir un diagnostic
personnalisé. Toutefois, la contrepartie de cette approche est l’identification de variations dans différents gènes qui auront besoin d’être validés comme pathogènes par la suite. Nous deviendrons donc un acteur important de cette initiative grâce à nos modèles qui permettront de valider/définir si les variations identifiées sont réellement à l’origine de la maladie. En parallèle, nous utilisons ces mêmes modèles pour tester l’efficacité des thérapies personnalisées.
Il est donc essentiel que nous conservions cette technologie à Montpellier et pour continuer ainsi, nous avons besoin de forts soutiens financiers pour garder du personnel expérimenté et pour participer aux coûts élevés de fonctionnement. Ceci est encouragé par la générosité des donateurs du Fonds de Dotation vaincre Usher2, présidée par Madame Brigitte Rouillac en Bretagne. Ce partenariat nous aide dans le financement du Dr Carla Sanjurjo-Soriano, post-doctorante, et nous aiderait en 2021 dans le financement d’une ingénieure d’étude pour notre activité en pleine expansion dans le domaine des cellules iPS. Nous sommes extrêmement reconnaissants aux donateurs du Fonds de Dotation rennais d’avoir compris l’enjeu de cette technologie et de notre recherche, qui conforte notre Équipe Vision à rester un acteur clé dans le combat contre la déficience visuelle. Nous vous remercions vivement. Vasiliki Kalatzis Directeur de Recherche Inserm Équipe Vision INM, Inserm U1051.
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